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Miguasha : De l'eau à la terre (Le parc national de Miguasha)

Les dipneustes

Les animaux étranges que sont les dipneustes ont intrigué les premiers naturalistes qui ont étudié les quelques espèces vivantes actuelles.Reconstitution du dipneuste Scaumenacia de MiguashaIcône de loupe(44 ko) Ce ne sont pas des amphibiens avec des nageoires, mais bel et bien des poissons avec des poumons!

Ces curieux poissons sarcoptérygiens sont apparus dans les mers du Dévonien inférieur, ont atteint une diversité maximale au Dévonien supérieur, ont connu un regain de diversité au Trias, pour ensuite décliner graduellement. Aujourd’hui, il n’en subsiste que trois genres: le Neoceratodus en Australie, le Lepidosiren en Amazonie et quatre espèces de Protopterus en Afrique tropicale.

Leur nom signifie "respiration double" car en plus des branchies, tous les dipneustes ont un ou des poumons fonctionnels permettant la respiration aérienne. L’air est même indispensable aux espèces américaines et africaines qui se noient si elles n’ont pas accès à la surface tellement leurs branchies sont dégénérées.

Avec de telles caractéristiques, on peut comprendre que les chercheurs d’autrefois aient proposé ce groupe de poissons comme possible ancêtre des vertébrés terrestres. L’espèce australienne a même encore des nageoires suffisamment fortes pour se hisser sur les berges et ramper péniblement vers un autre point d’eau. Mais on sait, grâce à la paléontologie, que les dipneustes sont une lignée de sarcoptérygiens qui a développé ces adaptations évolutives en parallèle avec d’autres groupes, sans pour autant atteindre des formes terrestres.

On reconnaît ces poissons à différents traits, principalement au niveau de leur anatomie crânienne. Le crâne et l’appareil masticatoire semblent tendre vers une certaine consolidation. Il n’y a plus de dents marginales sur la mâchoire inférieure et des plaques dentaires dans le palais font office de zone de broyage. Ces plaques dentaires sont un peu comme de multiples dents à demi fusionnées les unes aux autres, formant au final une plaque dense et dure qui se fossilise assez bien. C’est pourquoi on ne retrouve parfois que ces plaques dans les sédiments et que près de la moitié des quelque 300 espèces fossiles connues, n’ont été décrites que par leurs plaques dentaires.

Les espèces fossiles dont on connaît tout le corps avaient tout un gréement de nageoires indépendantes placées postérieurement et permettant une poussée puissante dans l’eau. Chez les dipneustes actuels, au contraire, les nageoires dorsale, caudale et anale sont fusionnées en une seule nageoire qui entoure toute la partie postérieure de l’animal.

Les dipneustes modernes d’Afrique ont un comportement d’estivation bien spécial. Lorsqu’une période de sécheresse s’amorce, ils se creusent un terrier dans la boue et s’y enfouissent pour plusieurs mois. Une fois l’eau complètement retirée et la terre séchée, ils demeurent ainsi dans le sol, respirant par leurs poumons en attendant le retour de la pluie pour sortir et se remettre à nager.

Des terriers fossilisés contenant des dipneustes en estivation ont été retrouvés dans des couches du début du Permien.
Et l’on croit que ce comportement qui implique la capacité de respirer à l’air libre serait apparu à la fin du Dévonien ou au Carbonifère, alors que le groupe envahissait les écosystèmes d’eau douce.

La faune fossile de Miguasha compte deux représentants du groupe des dipneustes, le Scaumenacia et le Fleurantia. Il est peu probable qu’ils aient creusé des terriers, mais des détails de leur anatomie laissent supposer qu’ils pouvaient gober l’air comme les dipneustes actuels. Néanmoins, comme c’est le cas pour les autres dipneustes du Dévonien, c’était surtout grâce à leur mode de respiration branchial qu’ils tiraient leur oxygène.

Reconstitution du dipneuste Scaumenacia de Miguasha

Titre : Reconstitution du dipneuste Scaumenacia de Miguasha
Auteur : Illustration de François Miville-Deschênes
Sources : Parc national de Miguasha
Année : 2003

Description :
Le dipneuste Scaumenacia de Miguasha rappelle à certains égards la physionomie de son lointain descendant, le Neoceratodus, dipneuste actuel d’Australie. Les rares représentants de ce groupe qui ont survécu jusqu’à aujourd’hui en Afrique, en Amérique du Sud et en Australie sont des reliques de temps aussi anciens que le Dévonien.