Sous la loupe, les écailles losanges de
Cheirolepis canadensis, avec leurs quatre ou cinq petites crêtes, ressemblent à de minuscules mains.
(24 ko) Plutôt petites pour un actinoptérygien, elles rappellent un peu celles des acanthodiens et elles dénotent le statut primitif de cette espèce. Cest le paléontologue canadien Joseph Frederick Whiteaves qui, en 1881, baptisa lanimal ainsi, sur la base de sa ressemblance avec
Cheirolepis trailli dÉcosse.
Dans les sédiments de la falaise de Miguasha,
Cheirolepis est le seul représentant du groupe des actinoptérygiens et les spécimens ne sont découverts que de temps à autres. Une situation de rareté plutôt ironique quand on sait que durant les dizaines de millions dannées suivantes, ses descendants deviendront les plus abondants des vertébrés.
(72 ko)Pouvant atteindre une cinquantaine de centimètres de long, les
Cheirolepis présentent un ensemble de caractères physiques qui feront le succès des actinoptérygiens. Il y a bien sûr les nageoires à rayons qui donnent son nom et sa suprématie au groupe. Mais on distingue aussi de grands orbites qui laissent deviner une bonne vue. Dotés en plus dune mâchoire à très grande ouverture, équipée dune série de dents bien pointues, les
Cheirolepis étaient assurément des prédateurs efficaces dans lestuaire de Miguasha. Leur corps fort et élancé était dailleurs conçu pour la nage rapide et soutenue.
Le fait quils aient été prédateurs nempêchait toutefois pas les plus petits individus de servir eux-mêmes de proies à loccasion. Des écailles de
Cheirolepis ont été retrouvées dans des coprolithes, des excréments fossilisés, et ils leurs arrivaient même de se dévorer entre eux, comme le montre un fossile de
Cheirolepis avec un semblable plus petit dans labdomen.
(104 ko)Létude des os de son crâne a révélé que la grande amplitude avec laquelle il pouvait ouvrir la bouche devait lui permettre davaler des proies faisant jusquaux deux tiers de sa propre longueur. Les agnathes, les acanthodiens, de même que les jeunes sarcoptérygiens et placodermes devaient donc tous faire partie de son menu.
La plupart des actinoptérygiens modernes ont une queue homocerque, cest à dire que le lobe du haut et le lobe du bas sont presque égaux et symétriques, comme par exemple la queue du saumon. Par contre,
Cheirolepis avait une queue épicerque, cest-à-dire que laxe de son corps se poursuivait dans un lobe supérieur plus développé. Maintenant, ce caractère primitif nexiste plus que chez quelques groupes comme celui des esturgeons.
La Formation dEscuminac a habitué les paléontologues à des spécimens très petits, soit des juvéniles, pour de nombreuses espèces. Mais ce nest pas le cas pour
Cheirolepis, les plus petits individus faisant déjà de 15 à 25 cm de long. Peut-être les jeunes
Cheirolepis vivaient-ils dans un tout autre milieu. Peut-être lespèce était-elle anadrome comme les saumons daujourdhui et peut-être les petits vivaient-ils en eau douce, beaucoup plus en amont dans la rivière.